Page:Aulu-Gelle - Œuvres complètes, éd. Charpentier et Blanchet, 1919, I.djvu/9

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
V
NOTICE SUR AULU-GELLE


sagacité, des fragments d’ouvrages perdus ; des investigations précieuses sur les langues, les institutions et les mœurs des anciens. Les citations qu’il emprunte aux vieux auteurs sont pour nous d’une utilité et d’une importance incontestables. On s’est étonné qu’il ne citât nulle part ni Quintilien, ni Pline le Jeune, ni Tacite, ni Lucain, ni Juvénal ; mais c’est là précisément le mérite de son livre ; c’était aussi le goût de son temps. Quand Fronton veut former Marc-Aurèle à l’éloquence, quels modèles lui conseille-t-il d’imiter ? Est-ce Cicéron ? non ; c’est Caton, ce sont les Gracques. L’empereur Adrien aussi préférait Caton à Cicéron, Ennius à Virgile. Sans doute, les Quadrigarius, les Valerlus Antias, ne valent pas les Tite-Live et les Tacite ; mais oeux-cl ne pouvaient périr ; et sans Aulu-Gelle, que saurions-nous des premiers ? Ne soyons donc pas surpris de cette prédilection d’Aulu-Gelle pour les curiosités de l’érudition et les obscurités de la vieille langue latine. Nous-mêmes n’en sommes-nous pas un peu là ? Ce qui nous attire aujourd’hui, ce qui sollicite les recherches des savants, ce ne sont pas, ce me semble, les grands écrivains du dix-septième ; ou si nous y revenons, ce n’est pas précisément aux plus purs que nous nous adressons, mais à ceux qui, par quelques archaïsmes de langage, par quelques tours et quelques formes naïves et gauloises, sa rapprochent un peu du seizième et même du quinzième siècle ; notre critique n’est plus guère que de la philologie. Soyons donc indulgents à ce goût d’Aulu-Gelle pour les étrangetés littéraires, historiques ou philosophiques. Moins exclusif, son ouvrage aurait pour nous moins de prix ; nous sommes assez renseignés sur les auteurs du siècle d’Auguste, qui, du reste, par leur simplicité même dans la grandeur,