Page:Austen - Emma.djvu/309

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s’est retirée dans sa chambre. Je voulais qu’elle se couchât ; « Ma chère, ai-je dit, étendez-vous sur votre lit » ; mais elle a refusé et elle marche de long en large dans sa chambre. Jane sera extrêmement fâchée de ne pas vous voir, Mademoiselle Woodhouse. On vous a fait attendre à la porte et j’étais tout à fait honteuse ; je ne sais pourquoi il y a eu un peu de confusion : par hasard, nous n’avions pas entendu frapper et nous avons été surprises lorsque nous avons distingué des bruits de pas dans l’escalier. « Ce ne peut être Mme Cole, ai-je dit, vous pouvez en être sûre. Personne d’autre ne viendrait d’aussi bonne heure ». – « Eh bien ! répondit-elle, il faut de toute façon que je subisse ses félicitations, le jour importe peu ». Mais quand Patty entra pour vous annoncer : « Oh ! me suis-je écriée, c’est Mademoiselle Woodhouse, vous serez, j’en suis sûre heureuse de la voir. » – « Je ne puis recevoir personne, dit-elle aussitôt en se levant. » Nous sommes sorties de la chambre et vous êtes entrée.

Emma était sincèrement intéressée : le récit des souffrances actuelles de Jane fit disparaître tous les soupçons peu généreux et ne laissa subsister que la pitié. La préférence accordée à Mme Cole lui sembla naturelle, étant donné sa propre conduite. Elle exprima des sentiments de sincère sympathie :

— Ce doit être pour vous un moment bien cruel. J’avais compris que l’on devait attendre le retour du colonel Campbell pour prendre une résolution définitive.

— Vous êtes bien bonne, reprit Mlle Bates vous êtes toujours bien bonne…

Emma ne pouvait supporter d’entendre dire « toujours », et, pour couper court à ces sentiments de reconnaissance injustifiée, elle posa une nouvelle question :

— Puis-je vous demander chez qui Mlle Fairfax doit aller ?

— Chez une Mme Smallbridge, une charmante femme, tout à fait supérieure ; Jane doit s’occuper de trois petites filles, des enfants délicieux. Il est impossible de trouver une situation plus avantageuse, les familles de Mme Suckling et de Mme Bragge mises à part ; mais Mme Smallbridge est intime avec les deux et elle ne demeure qu’à quatre lieues de Maple