A LA MÉMOIRE
DE
GEORGES BÜCHNER
Les bons meurent jeunes —
Mais ceux dont les cœurs sont secs comme la poussière
De l’été, brûlent jusqu’à la fin !
Ainsi, une pourpre a dû, une fois de plus, tomber ! Une fois de plus, ô Destin, tu as ravi une couronne ! Tu
réchauffes les serpents entre tes pieds, et tu écrases la tête des jeunes aigles ! Tu fais choir les étoiles du ciel,
1. Ce poème fait partie du premier volume des Gedichte eines Lebendigen, (Poésies d’un vivant), publié en 1841. Georges Herwegh, on le sait, a été en Allemagne le chef de chœur des poètes libéraux précurseurs de la Révolution de 1848, ce qui lui a valu une popularité extraordinaire, qui aujourd’hui n’est plus guère qu’un souvenir. Présenté, à la suite de la publication de ses premières poésies, au roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV, celui-ci s’entretint longuement avec lui et lui dit pour finir, en lui tendant la main : « Nous voulons être de loyaux ennemis ». Mais le poète, grisé par sa popularité de jour en jour croissante, ne put résister à l’envie d’attaquer bientôt publiquement le roi, ce qui eut pour conséquence son expulsion de Prusse. Il vécut en Suisse, puis à Paris, qu’habite encore sa veuve. En avril 1848 il joua pendant une demi-journée un rôle politique militant dont le dénouement fort peu brillant le couvrit d’un