Page:Bakounine - Œuvres t3.djvu/76

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qu’une seule liberté possible : c’est de les reconnaître et de les appliquer toujours davantage, conformément au but d’émancipation ou d’humanisation tant collective qu’individuelle qu’il poursuit. Ces lois, une fois reconnues, exercent une autorité qui n’est jamais discutée par la masse des hommes. Il faut, par exemple, être un fou, ou un théologien, ou pour le moins un métaphysicien, un juriste, ou un économiste bourgeois, pour se révolter contre cette loi d’après laquelle 2 x 2 font 4. Il faut avoir la foi pour s’imaginer qu’on ne brûlera pas dans le feu et qu’on ne se noiera pas dans l’eau, à moins qu’on n’ait recours à quelque subterfuge qui est encore fondé sur quelque autre loi naturelle. Mais ces révoltes, ou plutôt ces tentatives ou ces folles imaginations d’une révolte impossible, ne forment qu’une exception assez rare ; car, en général, on peut dire que la masse des hommes, dans sa vie quotidienne, se laisse gouverner |175 d’une manière à peu près absolue par le bon sens, ce qui veut dire par la somme des lois naturelles généralement reconnues.

Le grand malheur, c’est qu’une grande quantité de lois naturelles déjà constatées, comme telles, par la science, restent inconnues aux masses populaires, grâce aux soins de ces gouvernements tutélaires qui n’existent, comme on sait, que pour le bien des peuples. Il est un autre inconvénient : c’est que la majeure partie des lois naturelles qui sont inhérentes au développement de la société humaine, et qui sont