Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/62

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triche, la Belgique, la Hollande, la Suisse, l’Italie, l’Espagne et le Portugal[1] ?

Non, leur imagination et leur appétit politique n’embrassent pas tant de pays à la fois. Ce qu’ils veulent avec une passion qu’ils |109 ne cherchent pas même à masquer, c’est l’organisation de leur patrie allemande, de la grande unité germanique. C’est l’institution de l’État exclusivement allemand que le premier article de leur programme pose comme le but principal et suprême du Parti ouvrier de la démocratie socialiste. Ils sont des patriotes politiques avant tout.

Mais, alors, que laissent-ils à l’internationalité ? Que donnent ces patriotes allemands à la fraternité internationale des travailleurs de tous les pays ? Rien que des phrases socialistes, sans réalisation possible, parce que la base principale, première, exclusivement politique, de leur programme, l’État germanique, les détruit.

En effet, du moment que les ouvriers de l’Allemagne doivent vouloir et servir avant tout l’institution de l’État germanique, la solidarité qui devrait, au point de vue économique et social, les unir jusqu’à les confondre avec leurs frères, les travail-

  1. Déjà au Congrès de l’internationale à Bâle, l’année précédente (septembre 1869), Bakounine avait opposé ce qu’il appelait l’État international à la conception traditionnelle de l’État, nécessairement national. Il avait demandé « la destruction de tous les États nationaux et territoriaux, et, sur leurs ruines, la constitution de l’État international de millions de travailleurs, État que le rôle de l’Internationale sera de constituer ». Demander la constitution de l’État international sur les ruines des États nationaux équivalait, dans sa bouche, à demander la destruction de l’État. — J. G.