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le sang de la coupe

Le Palais de la Mode

Il est un clair palais fait de cristal de roche,
Dans un nid de rosiers, au bord d’un fleuve bleu.
Les vases, les émaux, les verres de Lahoche
Y brillent sous l’argent des chandeliers en feu.

Dans le nuage gris qui sort des cassolettes
Folâtrent des oiseaux peints de mille couleurs,
Et, veloutés et frais comme des violettes,
Les divans parfumés se cachent dans les fleurs.

Sur leurs pâles coussins plus doux qu’une caresse,
Repose un front couvert des ornements royaux.
C’est le front triste et pur d’une jeune Déesse
Qui sous ses petits pieds foule mille joyaux.

Elle brise en jouant, comme un oiseau son aile,
Tous les hochets d’hier, cent caprices dorés,
Et rêve, en chiffonnant la soie et la dentelle,
Aux caprices nouveaux qui seront adorés.