Page:Banville - Œuvres, Les Cariatides, 1889.djvu/123

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Quel rêve ambitieux te poursuit, ô Damète !
Et verse des poisons dans ton âme inquiète ?
Pourquoi ne plus unir nos deux pipeaux, formés
De sept roseaux divers sous la cire enfermés ?

                           Damète.

Parce que l’aigle altier ne rase pas la terre,
Que dans le nectar seul un dieu se désaltère,
Et que, comme Phyllis et la nymphe des bois,
Je puis chanter les Dieux sur la lyre à dix voix.

                           Daphnis.

Cet orgueil ne convient qu’aux poètes des villes.
Pan ne dédaigne pas les Muses les plus viles,
Et, berger comme nous, aime de simples chants.

                           Damète.

Que m’importent les vers qu’il faut aux dieux des champs ?
Il en est de plus hauts dont la troupe choisie
Sur l’Olympe neigeux s’enivre d’ambroisie.

                           Daphnis.

Pâris, l’enfant royal dont la voix décida
Entre les trois splendeurs au sommet de l’Ida,
Chantait près du troupeau qui lui donnait sa laine.