Page:Banville - Œuvres, Les Cariatides, 1889.djvu/82

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Pour les fleurs sans parfum, le satin et le cierge,
Oublia-t-elle donc ses doux serments de vierge ?
Son cœur fut donc un gouffre où l’on pouvait plonger
Ses rêves, sans que rien ne dût y surnager ?
Peut-être. Elle ne vit dans cet épithalame
Qu’un moyen tout trouvé de jouer à la dame.
Elle eut de fins chevaux, des villas, des palais,
Du drap rouge fort cher sur les corps de valets,
Et fit merveille au bois avec ses équipages.
On prétendit alors qu’elle eut même des pages.
  Aussi ne parlons pas de ces pensionnats
Où l’on a le secret de charmants incarnats
Pour se faire monter la pudeur au visage,
Lorsqu’un œil indiscret vous fixe le corsage.
Oh ! si quelqu’un lisait sous vos regards baissés
Tous les impurs désirs dont vous vous enlacez,
Courtisanes d’esprit, filles dont le corps chaste
Est comme un champ de fleurs que l’ouragan dévaste !
Pâles virginités, vertus sans lendemain,
Laissant votre dépouille aux buissons du chemin !
Écoute, le hasard, ou bien les Dieux prospères
M’ont fait vivre un instant dans un de ces repaires.
J’y cherchais un écho des chants du paradis.
N’aurais-tu pas pensé comme je pensais, dis ?
Eh bien, souvent, le soir, caché sous des charmilles,
J’ai surpris le secret de quelques blondes filles,
J’écoutais inquiet, presque comme un amant,
Et j’ai senti le rouge à ma face. Vraiment