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LES EXILÉS


Roland


Roncevaux ! Roncevaux ! que te faut-il encor ?
Il s’est éteint l’appel désespéré du cor.
Hauts sont les puys et longs et ténébreux, mais Charles,
Frémissant dans sa chair, entend que tu lui parles,
Et, couchés à jamais pour l’éternel repos,
Les païens gisent morts par milliers, par troupeaux,
Sur le sable, à côté des Français intrépides.
Ah ! les vaux sont profonds, et les gaves rapides,
Et la rafale fait tournoyer sur les monts
Ces âmes de corbeaux qu’emportent les démons.
Tandis que l’Empereur à la barbe fleurie
Accourt, hélas ! trop tard vers l’affreuse tuerie,
Ô douleur ! dans le fond des défilés étroits,
Au pied des rocs de marbre, ils ne sont plus que trois :
L’archevêque Turpin, qui, la mort sur la joue,
Navre encor les païens, qu’on l’en blâme ou l’en loue,
Et le brave Gautier de Luz, et puis Roland.
Olivier est tombé, qui, déjà chancelant,