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nore ! Le large front, si ferme et hardi, sans bosses vides ! bien découvert aux extrémités sous une chevelure drue, noire comme l’Érèbe et tondue de près, les yeux non démesurément ouverts, mais lumineux, sagaces, avec une étincelle de flamme et bien abrités sous leurs sourcils presque droits, le nez osseux, torturé, à l’arête large, aux narines coupées très-hardiment, et s’enflant un peu au bout comme celui des grands penseurs, les joues solides, hâlées par le soleil et le vent de la mer, accusaient une énergie invincible, et la bouche ironique, bienveillante, sensuelle, aux lèvres pourprées, éclatait de vie dans une longue barbe ondoyante et tortueuse comme celle de Clément Marot. Ensemble heureusement accompagné par la cravate de soie blanche qui entoure son cou, et par la veste de velours noir qui habille son corps d’athlète. — Plus vrai encore fut l’Alphonse Karr de la première jeunesse, maigre, nerveux, vêtu d’une blanche robe de moine, irrité par le spectacle de la Bêtise humaine, et ne portant alors qu’une