Page:Banville - Les Belles Poupées, 1888.djvu/142

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

thé de cinq heures et aucunes dames, aux joues hypocritement peintes de rouges timides, ne viennent, en robes de Worth, me raconter des cancans de portières. De temps en temps, assez souvent même, nous donnons à nos voisins de ville et de campagne de grands festins, où on mange, non comme à Paris, des cristaux à grand spectacle et des porcelaines décorées comme des diplomates, mais des carpes géantes, des pâtés de venaison qui ressemblent à des forteresses, des longes de veau de rivière, des gigots de nos moutons, des perdreaux, des cailles et des bécasses, et aussi des cochons de lait, rôtis devant la flamme de la cheminée, et les légumes et les fruits de nos jardins, et des volailles non engraissées artificiellement, et des confitures faites par moi même, avec des fruits et du sucre ! Le tout arrosé par les meilleurs vins de France, dont nos caves sont pleines. Or, comme tu le comprends bien, des gens abreuvés et nourris de la sorte n’ont aucune raison pour être méchants, ou même bavards et pour remplacer le rôti par des tirades ; en sorte que nos convives nous font bonne et joyeuse compagnie.

Mais, la plupart du temps, nous sommes seuls ! Tu t’inquiétais de savoir si mon Auvergnat a de l’esprit. Il a bien mieux que cela.