Page:Banville - Les Parisiennes de Paris.djvu/190

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Alboni et de madame Lauters ? Il fallait entendre Naïs chanter :

Mes souliers sont rouges,
Ma mie, ma mignonne ;
Mes souliers sont rouges,
Adieu mes amours !
J’ai de beaux souliers,
Que ma mie m’a donnés, etc.

Et ceci :

J’ai un’ commission à faire,
Je ne sais qui la fera.
Si je l’dis à l’alouette,
L’alouette le dira.
La violette se double, double,
La violette se doublera.

Doux Ronsard, toi le vrai lyrique, tu aurais bien aimé Naïs ! Elle avait imaginé un mot charmant : dormette (cela voulait dire un lit). Pour dormir, elle disait aussi : Je vais faire ma dormette (alors cela voulait dire : mon somme.)

Mais c’est qu’elle en avait inventé une merveilleuse dormette ! En passant devant chez le serrurier qui vend des jardinières, sur le boulevard des Italiens, elle avait admiré, en souriant comme une petite folle, les petits berceaux d’enfants en fer doré et en soie jaune safran ou rose clair. Et Naïs, cette splendide femme de Flandre, s’était fait faire pour dormette un grand berceau rose et or !

C’est à Naïs, ce petit calepin à couverture d’argent niellé, ces souliers de chambre en soie blanche capitonnée, cette tresse de cheveux cendrés et ce marabout rose, (doux souvenir !) et encore cette poupée habillée par Palmyre ; car elle joue à la poupée, Naïs.