Page:Banville - Les Parisiennes de Paris.djvu/260

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si habile ouvrière, que ton travail chez nous suffira à ton entretien et à ta nourriture ; mais, dame ! il faudra piocher ferme.

Le logement, situé au quatrième étage, était trop exigu pour qu’il fût possible d’y coucher une personne de plus. Lefèvre avait donc loué au-dessus, au cinquième, une toute petite mansarde dans laquelle il avait mis un lit de fer et une petite commode antique. Madame Lefèvre prit Minette par la main, et la mena voir cette chambre qui devait être la sienne, puis elle lui donna la liberté d’aller au théâtre. C’était justement l’heure de la répétition. Minette entra au foyer, où on s’empressa autour d’elle avec tout le respect inspiré par son malheur. Son premier regard tomba sur Couturier, un nuage passa devant ses yeux, et elle s’évanouit presque. Madame Paul la prit sur ses genoux, et la réchauffa à force de baisers.

— Ah ! chère Paul, dit la jeune fille, n’est-ce pas que je reverrai ma mère ? N’est-ce pas que tu me conduiras vers elle ?

— Oui, oui, mon enfant, répondit l’actrice.

— Bientôt, n’est-ce pas, tu me le promets ?

— Oui, bientôt, je te le jure.

En prononçant ces derniers mots, madame Paul pouvait à peine cacher l’émotion qui faisait trembler sa voix. Car elle venait de regarder Minette, si pâle et de nouveau si amaigrie, et elle se disait que bientôt, en effet, la pauvre enfant serait près de sa mère.

Le directeur vint aussi parler affectueusement à Minette.

— Ma chère petite, lui dit-il, tu auras au moins quinze jours de liberté, et je suis heureux que tu puisses les consacrer à ta douleur. Soigne-toi et repose-toi bien