Page:Banville - Les Parisiennes de Paris.djvu/289

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Bientôt ils erraient furtivement sous les massifs du parc et échangeaient à voix basse des mots mystérieux d’amour et de rendez-vous. Ils rentrèrent avant qu’on eût pu remarquer leur absence. Raoul sentait brûler ses joues et ses lèvres où brillaient ardemment toutes les roses de l’espérance ; madame de Lillers était calme et rayonnante comme un ange victorieux.

Enfin, les flambeaux s’éteignirent et le château rentra bientôt dans son grave et morne silence.

Raoul, resté seul avec sa mère, l’embrassa avec mille transports. Puis, quand tout fut endormi, il se leva, et, en silence, parcourut les corridors obscurs, en tremblant d’émotion, en mettant la main sur son cœur pour en étouffer les battements, et poussa une porte laissée entr’ouverte.

Sylvanie était déjà à ses pieds, couvrant ses mains de baisers, et lui disant d’une voix douce et vibrante comme un chant :

— Raoul ! Raoul ! me pardonnerez-vous tout ce que vous avez souffert ?

Et, lui, baignait ses mains frémissantes dans les longs cheveux de sa maîtresse, dans ces beaux cheveux d’aurore et de flamme, et répondait en rêvant :

— Est-ce que je m’en souviens !

Au bout d’une heure il fallut se quitter ; l’alouette matinale, funeste à Roméo, chantait déjà sur les sillons encore endormis. Mais, pendant cette heure, Sylvanie déploya sans doute de bien étranges séductions ; car le cœur de Raoul était à elle, à elle pour toujours, mieux que si elle l’eût tenu dans sa main, attaché avec des liens d’or.

Raoul alla éveiller son ami. Il ne lui dit rien, mais Julien comprit tout dans un serrement de main. Tous deux