Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/172

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Il est évident qu’en coupant cette strophe en deux après le quatrième vers, nous obtenons deux strophes complètes et parfaitement bien portantes, l’une de quatre vers, l’autre de huit vers. Ce type de strophe n’occupe donc pas dans l’ordre lyrique un rang plus élevé que dans l’échelle animale un polype dont on peut dédoubler la vie en le coupant en deux.

Que faudrait-il pour que cette strophe existât ?

— Il faudrait que les quatre premiers vers fussent soudés aux huit derniers par un arrangement de rimes tel qu’on ne puisse séparer ces deux parties sans laisser dans l’une ou l’autre un vers privé de sa rime, c’est-à-dire sans avoir détruit, tué la strophe elle-même, puisqu’en français il n’y a pas de vie poétique sans la rime. C’est ce que le lecteur comprendra parfaitement tout à l’heure, quand nous examinerons le dizain et le huitain.

À plus forte raison, un Rhythme n’existe d’aucune manière et à aucun titre, quand il suffit de changer la disposition typographique du texte pour que l’existence individuelle de ce prétendu rhythme disparaisse complètement. Tel est, — j’en suis fâché, mais c’est le cas de dire : « Platon m’est cher, mais la vérité m’est plus chère que lui, » — tel est le célèbre ïambe prétendu d’André