Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/181

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cette belle strophe, qui fonne un tout d’une si parfaite cohésion. Naturellement le huitième vers qui renferme le trait, la chute, est le plus important du Hui- tain ; et cependant le poète doit mettre toute son ingéniosité dans Tinvention de la rime qui sera quadruplée, car il faut qu’elle puisse se lier et comme pensée et comme son avec les deux au- tres couples de rimes. — Dans tous ces rhythmes compliqués, Timagination, ou du moins, hélas! à son défaut, la science — de la Rime est indis- pensable.

Je passe au Dizain, et, comme pour le Hui- tain, je commence par les exemples.

DIZAIN ÉCRIT EN VERS DE DIX SYLLABES ET COMMENÇANT PAR UN VERS FÉMININ


Anne par jeu me jecta de la neige
Que je cuidoys froide, certainement :
Mais o/dstoit feu, l’expérience en ay-je,
Car embrasé je fuz soudainement.
Puisque le feu loge secrètement
Dedans la neige, où trouveray-je place
Pour n’ardre point? Anne, ta seule grâce
Estaindre peut le feu que je sens bien,
Non point par eau, par neige, ne par glace.
Mais par sentir ung feu pareil au mien.

Clément Marot. D’Anne qui lui jecta de la neige. Épigrammes, xxiv» Édition Pierre Jannet. ,. ^. .