Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/295

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naître la nouvelle Hélène, pour jamais rajeunie dans un flot d’éternité. Elle se nommera Cassandre, Marie, Hélène, immortelle figure à la fois idéale et réelle, que les neveux de Ronsard célèbrent encore sur la même lyre, dont l’harmonie enchantée ne peut plus s’éteindre ! Homère et Pindare! en les sentant là sous nos mains, assurés que nous sommes de les posséder à jamais, pouvons-nous deviner l’ivresse de ceux qui les arrachaient à l’épouvantable nuit du moyen-âge ! Retrouver non plus les Iliades apocryphes de Darès le Phrygien et de Dictys le Cretois, non pas les romans troyens de Benoît de Sainte-Maure et de Columna, non pas la version byzantine, non pas les essais de Jehan Samson et de Jean Lemaire, mais la vraie Iliade léguée aux âges par Périclès et Alexandre le Grand, mais l’Iliade de Rabelais et de Budé, celle que Pétrarque éperdu rend à l’Italie, celle qui ne périra plus jamais, revoir non plus le chevalier Hector mais le fils de Priam lui-même dans tout l’éclat de sa gloire farouche, quel triomphe et quelle joie !

Qui ne serait saisi de respect en se représentant Baïf, Ronsard et Turnèbe étudiant, commentant, devinant le texte sacré et lui demandant l’initiation, l’intelligence du beau ! Sans doute il eût mieux valu ne pas s’en inspirer pour écrire La