Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/94

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pu du moins lui vendre la Suisse, dont la nature sauvage et pure est par son âpreté même à l’abri des méchancetés et des convoitises de l’homme. On ne peut vendre l’insaisissable nuage; une telle nature wssout et renouvelle tout; comment asservir la neige et faire d’un mont sacré, comme rOrteler, un bandit? Comment briser la dent de Morcle entre, les roches gigantesques et sombres qui semblent être ses mâchoires? Comment en- chaîner le PITON de Zoug? Les monts sont des citadelles, au-dessus desquelles, ainsi que des fers de lance, brillent les étoiles. La montagne ap- pelée JuNGFRAu est, comme son nom le dit, une telle vierge que, si le plus grand conquérant du monde, quelque Alexandre, voulait l’insulter, il ne serait pour elle qu’un drôle, et elle lui cra- cherait l’avalanche à la face. Voilà les idées, les mots qui se heurtent dans la tête du poëte : est- il besoin de dire que chacun de ces mots lui apparaît avec sa rime jumelle, et qu’il a pensé roches noires en même temps que mâchoires et JOUG en même temps que piton de Zoug, et que yowy a amené nécessairewienlassembleurde bœufs y comme les autres rimes et les nécessités de l’harmonie ont immédiatement créé tous les beaux mots intermédiaires. Restent à trouver le dessin harmonique, les mots corrélatifs, les che-