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1604. juin.

Bourbonne, et nous a Espinal, et de là a Nancy : et le lendemain que j’y fus arrivé, j’allay a Toul au devant de ma mere, quy revenoit de France, et l’emmenay a Harouel, ou madame d’Espinal[1] la vint voir le lendemain : et le jour d’apres, on rapporta le corps de feu mon frere de Removille, quy avoit esté blessé d’une mousquetade au genouil a la prise du Porc-Espic au siege d’Ostende[2] ; duquel coup il luy fallut couper la jambe, et en mourut cinq jours apres ; quy me fut un sensible deplaisir et une signalée perte ; car c’estoit un homme de grand cœur et de bon jugement, et quy, avec apparence, estoit pour faire une grande fortune. Je l’avois laissé aupres du roy en m’en allant en Hongrie, pour terminer l’affaire de Saint-Sauveur, laquelle je desduiray, comme celle quy m’a fait changer mes desseins, et quy me fit quitter la charge que j’avois en Hongrie, quy fut aussy cause de la mort de mon frere.

Une tante de ma mere, nommée madame de Moreuil, luy donna soissante mille escus, la mariant avec feu mon pere : et pour asseurer cet argent a ma mere, il le fallut employer en chose quy luy tint nature de propre ; ce que l’on fit en prenant en engagement du roy le comté de Saint-Sauveur le Viscomte, de Saint-Sauveur Lendelin, et la baronnie de Nehou[3], pour quarante

  1. Yolande de Bassompierre, abbesse d’Épinal.
  2. Voir à l’appendice. IX.
  3. Saint-Sauveur-le-Vicomte, chef-lieu de canton de l’arrondissement de Valognes (Manche). — Nehou, village du canton de Saint-Sauveur-le-Vicomte. Saint-Sauveur-Lendelin, chef-lieu de canton de l’arrondissement de Coutances (Manche).