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journal de ma vie

noissions point particulierement. Cela me mit bien en peine : en fin je m’advisay d’aller trouver madame de Lomenie[1], pour tascher, par son moyen, de faire estouffer cette affaire, soit en faisant retirer cette lettre, ou en escrivant a son mary pour le faire entendre au roy d’un biais qu’il ne s’en fachat point. Je la trouvay fort empeschée a faire une despesche a la court, et me pria de m’asseoir jusques a ce qu’elle eut achevé une lettre fort importante qu’elle escrivoit a son mary. J’eus aussy tost soubçon que c’estoit sur le sujet quy m’amenoit vers elle, et luy demanday s’il estoit arrivé quelque chose de nouveau quy fut sy pressé a mander. Elle me dit que ouy, et que l’on avoit voulu contrefaire les cachets du roy, et que par malheur, celuy qui les faisoit contrefaire s’estoit sauvé, mais que la lettre de la main du roy estoit demeurée, laquelle elle envoyoit a son mary, affin que le roy mandat a quy il l’avoit escrite, et par quy il l’avoit fait porter, moyennant quoy on esperoit de descouvrir le fond de cette affaire, et qu’elle voudroit qu’il luy eut cousté deux mille escus, et qu’elle en fut pleinement esclaircie. Je luy promis pour cette somme, sy elle me la vouloit bailler, de luy descouvrir, et luy dis en suitte la mesme excuse que j’avois faite a madame de Moret : et comme elle et son mary estoint de mes intimes amis, elle apaisa le tout, pourveu que je voulusse moi-mesme aller a

  1. Anne d’Aubourg, mariée à Antoine de Loménie, seigneur de la Ville-aux-Clercs, secrétaire d’État.