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journal de ma vie

lois que sa lettre et son seing parlassent, et que moy seulement en fusse le porteur.

Bouvet me dit que difficilement pourroit-il faire cela : « Ny moy, respondis-je, rapporter rien que je ne l’aye, escrit et sinné. » Sur quoy nous nous separames ; et l’ayant prié de faire sçavoir à S. A. cette mienne determinée resolution, il me pria de songer aussy de ma part a quelque expedient quy ne fut point cela, et fut neammoins cela mesme. Je luy respondis sur l’heure que j’en avois un en main quy me deschargeoit, et ne l’engageoit pas ; quy estoit de l’envoyer, luy president, ou quelque autre personne affidée, porter sa response au roy avec une lettre de creance, et qu’il n’y avoit point d’autre moyen que l’un de ces deux là.

Je m’en vins le lendemain matin voir le duc, quy ne me parla en aucune façon de cette affaire, parce qu’il y avoit force monde ; mais bien me dit-il que sy je le venois desbaucher incontinent apres disner, qu’il feroit quelque partie a la paume avesques moy. J’y vins selon ce qu’il m’avoit dit ; et, l’ayant trouvé dans sa galerie, il me dit qu’il estoit tout resolu de se conformer aux volontés du roy, et recevoir l’honneur qu’il luy vouloit faire : seulement desiroit il de gaigner et disposer les principaux de son estat pour leur faire gouster ce mariage, et le pallier cependant a ses parens jusques a ce qu’il fut temps de le descouvrir ; suppliant tres humblement Sa Majesté de le vouloir cependant tenir secret, me priant aussy de recevoir cette response de sa part pour la porter au roy avesques une lettre de creance relative sur moy.

Je luy respondis lors que j’estois venu avec lettre