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1613. janvier.

priay d’aller au lever de Mr de Guyse et luy parler, luy offrant jusques a cent mille escus, avec le retour de la Rochefoucaut, l’estouffement de l’affaire de son frere le chevalier, et les bonnes graces de la reine a l’advenir. Il trouva Mr de Guyse, selon sa coustume, extravagant d’abord, puis concluant a tout ce qu’il voulut, y ayant esté preparé par sa femme le soir et la nuit precedente.

Lors ils m’envoyerent querir, et je luy donnay parole de la part de la reine (quy me l’avoit commandé), d’effectuer tout ce que Mr Zammet luy avoit promis. Il demanda que son rabiennement avec elle ne parut pas tout a fait d’abord, affin qu’il aye loisir de rompre honnestement avesques Mr le Prince, ou il estoit aucunement engagé. Il ne voulut que personne fut aupres de la reine quand il luy parleroit, tant pour ne faire soubçonner, que pour luy parler encores plus franchement et avec de plus efficaces paroles : ce qu’il fit le mesme jour, 12me de janvier, sur les six heures du soir.

Je revins a mon logis, ou j’escrivis une autre lettre a la reine, par laquelle je luy fis sçavoir ce que j’avois fait avec Mr de Guyse, et l’envoyay a Sauveterre ; puis allay trouver Mr d’Espernon, ou je trouvay desja Mr Zammet arrivé. Il me dit beaucoup de choses qu’il avoit a dire contre la reine, et conclut qu’elle estoit nostre maitresse, nostre reine, regente du royaume, femme et mere de nos deux maitres, et que nous devions tout souffrir d’elle sans nous reffroidir de la servir en toutes occasions, et principalement en celle-cy, ou elle avoit besoin de ses serviteurs ; que, pour luy, il tenoit a affront que l’on luy offrit rien, et croyroit