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journal de ma vie

sçavois par cœur. Elle se mit a rire, et me dit qu’elle n’en vouloit pas en cette sorte, mais d’escrits de sa main. Je me mis aussy a rire de ce desir, et elle me dit : « Je ne vous puis pas maintenant dire pourquoy ; mais ne manqués pas de m’en rapporter, et n’en montrés pas d’affectation ; car je ne veux pas qu’il paroisse que j’en veux. » Puis elle me parla longtemps contre le marquis d’Ancres, me disant qu’il se gouvernoit sy mal qu’en fin il se ruineroit ; et moy je l’excusay toujours le mieux que je peus. Elle me dit : « Il fait l’entendu, et ne bouge d’avesques une cabale quy m’est entierement contraire et opposée. Dittes luy que je luy mande que, s’il n’est jeudy au soir icy, je l’apprendray a m’obeir ; et sy ce n’estoit sa femme, je l’aurois desja mis en un lieu dont il ne sortiroit pas quand il voudroit : sa femme en enrage, et luy, fait toujours de pis en pis. Dittes luy qu’il ne manque pas a faire ce que je luy commande. » Puis m’ayant encore donné quelque autre commission, selon qu’elle s’avisa, je m’en vins a Paris, ou j’arrivay sur les dix heures du matin, le mardy.

Comme je me changeois d’habillemens, le marquis d’Ancres arriva cheux moy, quy me demanda des nouvelles de la court, et sy Mr  de Guyse ne venoit point. Je luy dis que non, et la cause. Puis en suitte je luy fis l’ambassade dont la reine m’avoit chargé. Il me dit la dessus beaucoup de choses fort en colere : qu’il estoit homme d’honneur, et que, sy la reine manquoit

    la princesse de Conti, et par conséquent de Bassompierre, et qui avait à la cour la surintendance des ballets.