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1621. novembre.

derniere sorte estoint deux milliers de poudre menue grenée que je leur priois de me prester, lesquels leur seroint remplacés quand l’equipage de l’artiglerie passeroit par devant leur ville, et que j’y avois desja pourveu ; ce que je voulois en payant estoint six cens pelles, trois cens pics et trois cens hoyaux, quelques serpes et quelques haches, que je ferois payer comptant, comme aussy trente mille pains presentement, et dix mille par jour tant que ce siege dureroit ; que je demandois qu’ils prissent ce soin là et m’en delivrassent, et que je leur mettrois argent en main pour faire faire toute cette fourniture. Ces messieurs me firent response qu’ils alloint assembler le conseil de ville pour en resoudre et puis qu’ils me viendroint parler, ce qu’ils firent au bout d’une heure ; et leur response fut qu’ils trouvoint fort bon que je fisse faire les outils que je demandois, et que s’il y en avoit, on me les donnat en payant ; que pour leur poudre menue grenée, ils ne s’en vouloint desgarnir, mais que sy j’en trouvois a vendre cheux les marchands, ils permettroint de la sortir de la ville ; que pour la quantité de pains que je demandois, ils ne pouvoint souffrir que l’on la tirat de leur ville, car cela y mettroit non seulement la cherté, mais encores la disette : et sur cela me vindrent presenter du vin de la ville qu’ils me prierent de recevoir. Je leur respondis :

« Messieurs, je ne veux ny ne dois accepter le vin de ceux quy refusent le pain au roy, ny moins demeurer en une ville que je ne crois pas quy luy soit gueres plus affectionnée que Montauban, et quy peut estre le seroit moins sy elle estoit aussy forte. Je viens vous oster une taye de l’œil et ouvrir le commerce de vostre