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1622. avril.

estoit plus avancée, et chasque battaillon alluma forces feux pour se secher.

Sur les trois a quattre heures du matin, a la pointe du jour, l’on marcha au plus bel ordre qu’il se pouvoit penser, en l’ordre donné pour la battaille, dans les lieux plains ; et quand nous trouvions des collines, nous marchions nostre avant garde premiere, suyvie de la battaille, et en suitte l’arriere garde ; puis des que la plaine revenoit, l’avant garde faisoit halte a droitte, la battaille se mettoit a sa gauche, et l’arriere garde a celle de la battaille. Ainsy nous marchasmes jusques a la veue des ennemis pres de deux lieues, lesquels se jetterent dans les vaisseaux et dans Saint Gisles, et les autres mirent les armes bas, nous demandans misericorde, sans rendre aucun combat. La cavalerie s’en fuit de mesme ; mais ne pouvant faire une sy longue retraitte, la plus part fut tuée en la suitte de la victoire, ou par les païsans. Il y mourut sur le champ, tué de sang froid sans resistance, plus de quinse cens hommes, et plus d’autant prisonniers quy furent envoyés aux galeres ; le reste fut tué par les gens de Mr de la Rochefoucaut, ou par les païsans, de telle sorte que Mr de Soubise rentra à la Rochelle avec trente chevaux de sept cens qu’il avoit ; et ne s’en retourna pas quattre cens hommes de pié de sept mille qu’il y en avoit le jour precedent dans son armée. Il y eut bien cent cinquante gentilshommes ou officiers pris, et sept pieces de fonte d’artillerie[1]. La Chaume,

  1. « Ce fut ung coup du ciel d’avoir preservé le roy engagé en l’isle : et de la victoire sans ung seul blessé, ou fort peu : il y fut tué plus de huict mille hommes, canon, drapeaux et bagages per-