Page:Beaumarchais - Œuvres choisies, édition 1913, tome 2.djvu/47

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deux hommes qui jasent sont moins suspects qu’un seul qui se promène. Ayons l’air de jaser. Eh bien, cet emploi ?

FIGARO. Le ministre, ayant égard à la recommandation de Votre Excellence, me fit nommer sur-le-champ garçon apothicaire.

LE COMTE. Dans les hôpitaux de l’armée ?

FIGARO. Non ; dans les haras d’Andalousie.

LE COMTE, riant. Beau début !

FIGARO. Le poste n’était pas mauvais, parce qu’ayant le district des pansements et des drogues, je vendais souvent aux hommes de bonnes médecines de cheval…

LE COMTE. Qui tuaient les sujets du roi !

FIGARO. Ah, ah, il n’y a point de remède universel —… mais qui n’ont pas laissé de guérir quelquefois des Galiciens, des Catalans, des Auvergnats.

LE COMTE. Pourquoi donc l’as-tu quitté ?

FIGARO. Quitté ? C’est bien lui-même ; on m’a desservi auprès des puissances : L’envie aux doigts crochus, au teint pâle et livide…

LE COMTE. Oh grâce ! grâce, ami ! Est-ce que tu fais aussi des vers ? Je t’ai vu là griffonnant sur ton genou, et chantant dès le matin.