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un repas splendide. Les hommes burent du vin ; ils ignoraient les coups cruels que le destin leur réservait une fois la nuit venue, après que Hrothgar se serait retiré pour prendre du repos.

Un grand nombre de chevaliers gardèrent la salle comme ils l’avaient souvent fait jadis ; les bancs furent rangés et l’on étendit par terre des lits et des coussins. Un serviteur du roi dont les jours étaient comptés, s’étendit pour prendre du repos6. Ils mirent leurs boucliers sous leurs têtes ; sur le banc au-dessus de Beowulf on voyait le casque élevé, la cotte de mailles et la forte lance du héros. Ils avaient coutume de se tenir ainsi prêts au combat, aussi bien chez eux que pendant leurs campagnes guerrières, afin de pouvoir rendre service en toute occasion à leur souverain, car c’était un vaillant peuple.

XX

Ils se livrèrent alors au sommeil. Mais l’un d’eux expia cruellement le repos nocturne, ainsi qu’il était souvent arrivé dans le temps où Grendel possédait la salle et y commettait ses forfaits (mais sa mort était venue mettre fin à ses péchés). Ils virent alors qu’un être vengeur avait survécu à leur ennemi. La mère de Grendel, qui habite les flots horribles depuis le jour où Caïn tua son frère1 se souvint du malheur qui la frappait. Remplie de sombres pensées elle voulut exécuter une funèbre expédition et venger la mort de son fils2. Elle arriva à Heort où les Hring-Dene dormaient étendus dans la salle. Dès qu’elle fut entrée la situation des guerriers changea3. Leur effroi était amoindri cette fois autant que la force d’une femme comparée à celle de guerriers prêts au combat. L’épée fut tirée dans la salle, le bouclier vint s’affermir dans leurs mains, mais ceux4 qui virent le péril ne songèrent pas à se couvrir avec les casques et les larges cotes de mailles. — Elle se hâtait, elle voulait aller mettre sa vie en sûreté au loin, au