Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/22

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mais peu importe. Toujours est-il que les fédérés, notamment ceux des Ternes, lui avaient opposé une énergique résistance. On s’était battu ferme à la porte Dauphine d’abord, puis place Wagram, et enfin à la porte des Ternes même, où je vois encore un canonnier de la marine, à demi fou de rage, et assisté de deux titis du quartier, braquer éperdument sa pièce tantôt sur le mont Valérien, tantôt sur les tours de Notre-Dame. Ce n’était pas que l’opinion politique de ce pointeur fût incertaine, et tout indiquait en lui, geste, cris et costume, qu’il ne croyait pas travailler à la gloire de M. Thiers, mais grâce à un jeu de balistique dont l’invention revenait à ses jeunes servants d’artillerie, la caronade, virant sur son axe comme toupie, balayait tour à tour Sablonville et l’avenue ternoise, impartialement.

Bibi et Coco — tels étaient les noms homériques de ces apprentis Jomini — s’en gondolaient sur le talus des fortifs. Quant au canonnier, je n’ai pas besoin de vous dire que, quoique de première classe, il n’abattait, et en tous sens, que des cheminées, dans le ciel, et des platanes, sur la terre.

Encore n’était-ce pas des platanes. A cette époque, ce charmant quartier, où j’aurai fidè-