Page:Berlioz - À travers chants, 1862.djvu/43

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davantage à l’impression produite par cet adagio, que celle qu’on éprouve à lire le touchant épisode de Francesca di Rimini, dans la Divina Commedia, dont Virgile ne peut entendre le récit sans pleurer à sanglots, et qui, au dernier vers, fait Dante tomber, comme tombe un corps mort. Ce morceau semble avoir été soupiré par l’archange Michel, un jour où, saisi d’un accès de mélancolie, il contemplait les mondes, debout sur le seuil de l’empyrée.

Le scherzo consiste presque entièrement en phrases rhythmées à deux temps, forcées d’entrer dans les combinaisons de la mesure à trois. Ce moyen, dont Beethoven a usé fréquemment, donne beaucoup de nerf au style ; les désinences mélodiques deviennent par là plus piquantes, plus inattendues ; et d’ailleurs, ces rhythmes à contre-temps ont en eux-mêmes un charme très-réel, quoique difficile à expliquer. On éprouve du plaisir à voir la mesure ainsi broyée se retrouver entière à la fin de chaque période, et le sens du discours musical, quelque temps suspendu, arriver cependant à une conclusion satisfaisante, à une solution complète. La mélodie du trio, confiée aux instruments à vent, est d’une délicieuse fraîcheur ; le mouvement en est plus lent que celui du reste du scherzo, et sa simplicité ressort plus élégante encore de l’opposition des petites phrases que les violons jettent sur l’harmonie, comme autant d’agaceries charmantes. Le finale, gai et sémillant, rentre dans les formes rhythmiques ordinaires ; il consiste en un cliquetis de notes scintillantes, en un babillage continuel, entrecoupé cependant de quelques accords rauques et sauvages, où les boutades colériques, que nous avons eu déjà l’occasion de signaler chez l’auteur, se manifestent encore.