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AVANT-PROPOS

tempérament et ne pas pousser la sévérité jusqu’à la rigueur. Sans doute, la morale a des droits supérieurs à ceux de l’art et de l’imagination et elle est admise à les faire valoir. Mais n’est-ce pas la mal comprendre et la mal servir que de condamner en son nom des ouvrages de valeur, alors que des critiques, en l’espèce très qualifiés, les jugent avec une réserve très respectueuse, alors que des journaux catholiques (oh ! combien !) les recommandent à leurs lecteurs sans aucun scrupule ? Qu’on dérobe aux regards de la jeunesse des obscénités crues et des scènes troublantes, personne n’y contredira ; mais c’est mauvais calcul, ingénuité et injustice de forcer la plupart des vivants à lire exclusivement des berquinades sur la piété filiale, des romans à la guimauve et des sornettes sans valeur. »

Évidemment, ce sont des artistes qui parlent ainsi. Ils répondent par avance à ceux qui nous trouveront trop larges. Nous leur rendrons cette justice qu’ils tiennent compte, plus que d’autres imprudemment timorés, des exigences de l’art ; mais nous devons les avertir qu’ils font trop bon marché des exigences de l’âme.

Il y a sans doute des hommes exceptionnellement doués, des cérébraux, des esthètes, qui, par tempérament ou en vertu de je ne sais quelle oblitération du sens moral, voient en tout exclu-