Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/26

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en société, et s’amusant à effrayer son monde et même ses élèves par des fantasmagories et des bruits singuliers. Le même auteur cite les principaux ouvrages connus alors de notre artiste; parmi ceux que possédait la cour d’Autriche, se trouvaient deux éditions de la Tour de Babel, deux Portements de Croix, un Massacre des Innocents, une Conversion de saint Paul. Van Mander ajoute qu’il est dfficile d’énumérer tout ce qu’il a produit en diableries, enfers, sujets champêtres, etc. Parmi ceux qu’il mentionne, notons encore une Lutte entre Carême et Mardi-Gras, et une toile où l’on voyait employés tous les remèdes contre la mort.

De nos jours, plusieurs musées possèdent des œuvres de Breughel; à Bruxelles, un Massacre des Innocents, signé P. Brueghel. Le catalogue de la Galerie de Vienne lui attribue onze toiles; quelques-unes sont signées. Ce document, tout en indiquant pour dates certaines 1510-1570, ne laisse pas que de donner à Breughel, le vieux, un tableau, dont il fournit en même temps la signature : P. Brvegl. 1606. — C’est évidemment une toile de Pierre, le jeune. Son principal ouvrage est la Tour de Babel, celui-là même dont parle Van Mander. A Dresde, deux toiles, une Rixe de paysans et une Prédication de saint Jean; à Madrid, trois paysages avec figures; à Berlin, une Bataille entre des pèlerins et des estropiés près d’un cimetière de village; à Munich, une Prédication de saint Jean et une Paysannerie; au Louvre, une Danse de paysans et un autre sujet champêtre. Breughel, le vieux, possède des qualités fort remarquables et surtout fort originales. C’est un Flamand par excellence; il est l’initiateur, non-seulement de sa nombreuse descendance artistique, mais aussi des Van Ostade, des Teniers, des Brauwer, etc. Il y a encore chez lui la naïveté gothique; des défauts saillants déparent quelques-unes de ses œuvres; il ignore le clair-obscur; il ne connaît ni la dégradation des teintes, ni celle des plans; son dessin est lourd parfois; sa manière est souvent spirituelle; ses toiles sont animées; ses charges sont plaisantes, mais souvent exagérées; son goût est médiocre; il introduit des conceptions grotesques jusque dans les scènes religieuses; il a beaucoup d’invention, mais ses inventions ne sont pas toujours ingénieuses. Il habille ses personnages de vêtements bizarres où il prodigue les couleurs éclatantes; il produit par là un effet peu harmonieux; ses paysages sont d’un vert prononcé, souvent bleuâtre qui nuit à l’art avec lequel ses sites sont rendus : « Ses paysages, dit Mariette, sont de très-grande manière. Lorsqu’il avait fait le voyage d’Italie, il s’était arrêté dans les Alpes, et y avoit dessiné des vues qui ordinairement embrassent de grandes étendues de pays; on voit de ces paysages dessinés à la plume qui ne seroient pas désavoués du Titien. » Voilà certes un bel éloge. Ajoutons qu’il excella à rendre le type paysan et les façons des villageois. En somme, c’est un peintre fort curieux à étudier, parce qu’on retrouve en principe chez lui toutes les qualités et les défauts de l’école villageoise dont il est, en réalité, le chef. Son portrait a été gravé par J.-H. Wierix et copié par H. Hondius avec des vers de Lampsonius; un autre a été dessiné par B. Spranger et gravé par Égide Sadeler. Pierre Breughel, le vieux, a gravé en grands bois l’Histoire d’Ourson et Valentin, mascarade datée de 1566. — Parmi ses autres gravures, il faut citer : Paysage avec la chute d’Icare; — Kermesse flamande, datée de 1559; — La maîtresse d’école, datée de 1559; — un sujet grotesque et emblématique incompréhensible; — La fête des tireurs; enfin la Vue du Rhin, avec l’histoire de Mercure et Psyché, datée de Rome, 1553.

Ad. Siret.

BREUGHEL (Pierre), dit d’Enfer, fils de Pierre, le vieux, peintre d’histoire en petit, de genre, de diableries, scènes de sorcières, incendies, etc., naquit à Bruxelles, probablement vers 1564. Jusqu’à présent on n’a pu préciser l’époque de sa naissance; ses parents se marièrent en 1563 et il fut l’aîné de leurs enfants. Pierre apprit la peinture à Anvers, auprès de Gilles van Coninxloo. Lorsque ses années d’étude furent ache-