Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/129

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vre au sein de la société, son attitude est fière et ses victoires sont cruelles. Mais, sur la scène politique, elle n’apparaît que languissante et soumise. Il n’y a plus qu’un véritable pouvoir en France : c’est la chambre et les ministres du roi sont les commis de ce pouvoir.

Pour première preuve de la justesse de cette observation, je trouve la guerre d’Espagne.

Est-il besoin de rappeler combien furent vives et obstinées les répugnances que le projet d’une expédition en Espagne rencontra dans le conseil ? M. de Villèle, qui était l’âme du ministère, regardait une semblable expédition comme une calamité publique. Louis XVIII ne l’envisageait qu’avec effroi. Et que de motifs pour l’en détourner ! Qu’allait-on faire en Espagne ? Renverser dans le sang des Espagnols la pierre de la Constitution ! Faire passer les Pyrénées à une sorte de 18 brumaire ! Pourquoi ? pour faire tomber violemment la Péninsule sous le joug d’Antonio Maranon et de ses pareils, hommes terribles qui tenaient un chapelet d’une main et un pistolet de l’autre ! Et pour qui ? pour Ferdinand VII, prince dont M. de Chateaubriand a dit qu’il était descendu de l’intrépidité de sa tête dans la lâcheté de son cœur, despote qui ne gardait que dédain aux monarques constitutionnels, à Louis XVIII et à sa Charte ! Il fallait de l’argent, d’ailleurs, pour cette expédition. Et M. de Villèle montrait le trésor épuisé, le crédit public ruiné, le