Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/232

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« Conseillez à vos camarades de se tenir tranquilles. » Le mouvement était partout, et ceux qui semblaient naturellement appelés à le diriger, restaient frappés de stupeur ! Chatelain, rédacteur en chef du Courrier Français, s’était écrié, en apprenant que le peuple décrochait les armoiries des fournisseurs brevetés et les traînait dans le ruisseau : « Que la partie serait belle pour le duc d’Orléans, s’il avait le cœur de la jouer ! »

Cependant le duc de Raguse, ayant reçu à huit heures du matin ses lettres de service, se rendit aussitôt chez M. de Polignac. Alors seulement fut remise au maréchal l’ordonnance royale qui le chargeait du commandement de la 1re division militaire. Cette ordonnance aurait dû lui être notifiée la veille ; mais le 27, M. de Polignac avait jugé à propos de mettre, par arrêté spécial, à la tête des régiments de la garde en garnison à Paris, le commandant de la place. Car, d’un côté M. de Polignac croyait qu’on viendrait fort aisément à bout de ce qu’il regardait comme une simple émeute ; et, de l’autre, il aurait mieux aimé procurer l’honneur de ce petit triomphe à un homme de son parti qu’au duc de Raguse qui, à la cour, passait presque pour un libéral.

Quoi qu’il en soit, Paris, le 28, ayant été mis en état de siége, le duc de Raguse se trouva investi, sous la surveillance du premier ministre, d’une véritable dictature militaire. Sa situation était cruelle. En se rangeant du côté des insurgés, il trahissait un roi qui avait compté sur lui en faisant prendre le deuil à tant de mères, sans croire même à la justice de sa cause, il commettait une atrocité ; en s’abstenant, il