Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/241

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nombreuses preuves de dévouement au roi, pour qu’il me soit permis, sans que mes intentions puissent être calomniées, de distinguer ce qui émane de lui des atrocités qui se commettent en son nom. J’ai donc l’honneur de vous prier, Monseigneur, de mettre sous les yeux du roi ma démission de capitaine de sa garde[1]. »

Cependant, une colonne commandée par M. de Saint-Chamans, et composée d’un bataillon du 1er  de la garde, d’un bataillon du 6e et de deux escadrons de lanciers, s’était dirigée par les boulevards vers la place de la Bastille, traînant avec elle deux pièces de canon. Elle marcha long-temps sans rencontrer une résistance bien vive, mais, arrivée à la hauteur des portes Saint-Denis et Saint-Martin, elle fut assaillie avec une extrême vigueur. Là, combattaient à la tête d’une foule héroïque et en guenilles, des jeunes gens qui apportaient au milieu du péril la vieille gaîté française, chefs de prolétaires qu’à leur bravoure élégante et à leur ardeur chevaleresque, on eût pris pour les héritiers de cette vaillante noblesse qui vainquit à Fontenoy. Attaquées de toutes parts, les troupes royales s’arrêtèrent et firent feu. Il n’y eût, cette fois, ni morts ni blessés. Les combattants s’en aperçurent et revinrent à la charge avec des éclats de rire qui se mêlèrent au bruit sinistre de la fusillade. On fit avancer les canons : au moment où on allait y mettre le feu, un enfant s’élance, court sur un officier, et d’un coup de pisto-

  1. « Je n’ai jamais reçu cette lettre je l’eusse renvoyée à son auteur. Au moment du danger, on n’accepte la démission de personne. »
    (Note manuscrite de M. de Polignac.)