Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/282

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et, chose assez remarquable, le cri qui sortait de toutes les bouches était celui-ci : À la commune ! À la commune ! cri révolutionnaire de la bourgeoisie au 12e siècle. Le général Vincent, qui dans ce même lieu, en 1814, avait été renversé de cheval en combattant les Cosaques, déploya une grande fermeté mêlée de prudence ; et déjà les esprits commençaient à se calmer, lorsqu’une colonne d’hommes du peuple, armés de fusils ou de pistolets, et les bras nus, se précipita sur la route. Alors les cris recommencèrent. L’agitation devenait terrible : le général Vincent prit le parti de regagner sa troupe. Mais à peine avait-il rejoint les rangs, que les gendarmes l’abandonnèrent pour se ranger du côté du peuple, et il dut ramener les gardes-du-corps sur les hauteurs de Saint-Cloud.

Sur ces entrefaites, les ministres arrivaient au château. La voiture de M. de Polignac entra dans la cour presqu’en même temps que celle de M. de Sémonville. La duchesse de Berry, qui, au bruit des roues sur les dalles, avait ouvert sa fenêtre, envoya un salut amical à M. de Polignac seulement. Bientôt après, le grand référendaire, qui s’était rendu chez le duc de Luxembourg, fut appelé auprès du roi. À la porte de l’appartement, il rencontra M. de Polignac qui lui dit, en portant la main à son cou : « Vous venez demander ma tête ? N’importe. J’ai dit au roi que vous étiez là : parlez le premier. »

M. de Sémonville croyait trouver le roi dans une grande agitation : il fut frappé du calme de sa physionomie et de la gravité de son maintien. Charles X écouta d’un air incrédule les nouvelles alarmantes