Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/293

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tement lui-même. Un ouvrier, nommé Müller, avait été préposé à la garde d’objets précieux par le conservateur du Musée, M. de Cailloux. Il remplit ses fonctions noblement, avec fatigue, avec péril. Quelques jours après, quand l’ordre fut rétabli, un ouvrier, nommé Müller, se présentait chez M. de Cailleux, pour implorer quelques secours. Il était sans ouvrage et avait faim.

Pendant ce temps, la Seine charriait des livres, des chasubles, des rideaux, provenant de l’invasion de l’archevêché et une bande à laquelle s’étaient mêlés des pompiers, revenait triomphante de la caserne de Babylone, agitant au bout des baïonnettes les habits rouges des Suisses vaincus. Le peuple, avait pénétré violemment dans le musée d’artillerie : on vit donc briller, dans cette insurrection du 19e siècle, le casque de Godefroy de Bouillon, l’arquebuse à mèches de Charles IX, et la lance de François Ier.

Les troupes occupaient encore la cour du Palais-Royal, et des soldats de la garde étaient rangés en bataille sur la place. Quelques insurgés débouchant par la rue Montesquieu, se précipitèrent courageusement vers la grille qui donne accès dans la cour du château. L’un d’eux tomba percé d’une balle. Un autre franchit la grille, et se trouva seul au milieu de la garde et des Suisses. Mais tel était le caractère étrange de cette guerre que dans tout combattant le négociateur se confondait avec l’ennemi : l’homme du peuple, devenu prisonnier, entra aussitôt en pourparlers avec l’officier qui commandait, et la cour du palais fut évacuée.