Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/307

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Chez M. Laffitte tous n’avaient pas encore un plan aussi nettement tracé, mais tous appelaient de leurs vœux l’établissement d’un pouvoir ; les uns, pour que la révolution fut dirigée ; les autres, et c’était le plus grand nombre, pour qu’elle fut surveillée sévèrement et contenue. Déjà, du reste, la nécessité d’une direction avait été proclamée dans les rues par les combattants eux-mêmes. Plusieurs citoyens s’étaient réunis tumultueusement rue Sainte-Avoye, dans la maison de Garnier-Pagès. Il y avait été arrêté que le général Lafayette, le général Gérard, le duc de Choiseul, seraient invités à prendre en main la force publique. En même temps, par une coïncidence singulière, MM. Charles Teste et Taschereau créaient, dans les bureaux du National, un gouvernement provisoire, composé de MM. Lafayette, Gérard et Labbey de Pompières. Sur l’avis du poète Béranger, ce dernier nom fut remplacé par celui du duc de Choiseul. Et une proclamation, que le Constitutionnel trompé publia, répandit dans tout Paris la grande nouvelle d’un gouvernement qui n’existait que dans l’esprit de quelques courageux faussaires comptant sur le succès pour se faire absoudre.

Bientôt rien ne se fit dans la capitale qu’en vertu de ce pouvoir imaginaire : la ville la plus intelligente du monde fut gouvernée par un mot.

Des hommes, n’ayant reçu leur mandat que d’eux-mêmes, vinrent s’installer à l’Hôtel-de-Ville, comme représentants du gouvernement provisoire. En cette qualité, ils parodiaient la majesté du commandement, signaient des ordres, distribuaient des em-