Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/311

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peau une cocarde tricolore. Il lui fit dire par M. Poques de l’ôter, et comme le jeune homme en manifestait sa surprise : « Pas encore, mon ami », dit-il, en lui faisant un signe de la main. Pourtant des milliers de citoyens portaient déjà des rubans tricolores leur boutonnière. Mais telle était la stupeur dont cette révolution inopinée avait frappé les plus nobles esprits Au moment où M. de Lafayette entrait sous la voûte de l’Hôtel-de-Ville, la foule répandue sur la place de Grève poussa au ciel un long cri de joie mêlé à une décharge de mousqueterie. Le colonel Dubourg, prévenu par M. Étienne Arago de l’arrivée de ce personnage, avait répondu : « A tout seigneur, tout honneur. » Il alla au-devant du vieux général, s’inclina respectueusement devant lui, et une heure après M. de Lafayette tenait dans ses mains les destinées de la France.

Les députés qui avaient formé chez M. Laffitte un petit conciliabule dans lequel le public n’était pas admis, comprirent combien il leur importait de contrebalancer la puissance d’un homme qui avait reçu du peuple son investiture. Dans ce but, ils choisirent parmi eux, pour lui confier la direction des opérations actives, le général Gérard. Quant à l’organisation du pouvoir civil, fallait-il créer un gouvernement provisoire, comme le demandait M. Mauguin, ou seulement une commission municipale, comme le proposait M. Guizot ? Ce dernier avis prévalut, parce qu’il était le plus timide et ne décidait rien. On recourut au scrutin pour la désignation des membres dont cette commission devait être composée. Les noms qui sortirent du scrutin