Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/340

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se passait, lui rappela quelle mission lui imposait dans les circonstances présentes l’impulsion toute républicaine qu’il avait voulu donner à la charbonnerie, et finit en lui représentant que l’avènement au trône d’un autre Bourbon serait le signal d’une lutte nouvelle et terrible.

Assis dans un vaste fauteuil, l’œil fixe, le corps immobile, M. de Lafayette semblait frappé de stupeur. M. de Boismilon entre tout-à-coup. Il venait demander la liberté pour le fils aîné du duc d’Orléans, qui, ayant abandonné son régiment à Joigny, avait été arrêté par le maire de Montrouge, M. Leullier. « Il faut, au moins, qu’on vous laisse le temps de délibérer », dit M. Pierre Leroux à Lafayette ; et M. de Boismilon étant sorti, M. Pierre Leroux écrivit rapidement l’ordre de maintenir l’arrestation. Il présentait le papier à M. de Lafayette, qui était sur le point de signer, lorsque parut en uniforme de garde national M. Odilon Barot. 11 entraîna dans une autre pièce le vieux général, qui, cédant à de plus timides conseils, envoya M. Comte à Montrouge pour faire mettre le jeune prince en liberté.

D’un autre côté, le bruit de cette arrestation s’était répandu sous le péristyle du théâtre des Nouveautés, où bivouaquait, sous les ordres de M. Étienne Arago, une bande d’hommes violents et audacieux. « C’est un prince, crièrent-ils : allons le fusiller. » Et ils se mirent en marche. Ne pouvant les retenir, leur jeune chef écrivit à M. de Lafayette que la vie du duc de Chartres était en péril, et qu’il n’avait qu’à se hâter s’il voulait la sauver. Lui-même il eût