Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/362

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Au reste, la carrière était ouverte à toutes les témérités intelligentes. Que n’aurait pu, dans ce désordre, l’apparente folie d’un grand cœur ? On parlait bien dans Paris d’un gouvernement provisoire ; mais le fait suivant montre quelle était l’inanité de ce pouvoir si bizarrement redouté.

La garde nationale de Saint-Quentin demandait deux élèves de l’École polytechnique pour la commander ; elle avait envoyé, en conséquence, une députation à Lafayette, et lui avait en même temps fait passer l’avis qu’il serait facile d’enlever le régiment caserné à La Fère. Lafayette mande auprès de lui deux élèves de l’École, et les envoie à la commission municipale. Ils arrivent accompagnés de M. Odilon Barrot. Seul, M. Mauguin se promenait dans la salle. Instruit de l’objet de leur visite, il prit une plume, et commença une proclamation qui s’adressait au régiment de La Fère. Mais M. Odilon Barrot ayant interrompu son collègue par ces mots : « Laissez-leur faire cela : ils s’y entendent mieux que nous », M. Mauguin céda la plume à l’un des deux jeunes gens. La proclamation faite, le général Lobau se présente : on la lui donne à signer. Il refuse et sort. « Il ne veut rien signer, dit alors M. Mauguin : tout-à-l’heure encore il refusait sa signature à un ordre concernant l’enlèvement d’un dépôt de poudres. — Il recule donc, répondit un des élèves de l’École polytechnique ! Mais rien n’est plus dangereux en révolution que les hommes qui reculent. Je vais le faire fusiller. — Y pensez-vous, répliqua vivement M. Mauguin ? Faire fusiller le général Lobau, un membre du