Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/465

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été le foyer de conspirations orléanistes et bonapartistes. Les âmes y avaient gardé, en traits de feu, le souvenir des cruautés de la cour prévôtale, alors que la guillotine fonctionnait aux cris de vive Henri IV. De 1820 à 1825, la charbonnerie avait poussé à Lyon des racines profondes. La classe commerçante y était libérale ; et des instincts démocratiques, mêlés de bonapartisme, y dominaient dans la classe ouvrière accrue d’un grand nombre de vieux soldats, que le licenciement de l’armée de la Loire avait rendus aux travaux de l’industrie. L’ovation décernée en 1829 à Lafayette, revenant d’Amérique, prouvait de quelle indignation le ministère Polignac avait pénétré cette ville persévérante et brave. Sa résistance aux ordonnances pouvait donc être prévue à coup sûr. Et en effet, elle n’attendit pas, pour se soulever, la nouvelle de la victoire des Parisiens.

Ce fut le 29 que les journaux apportèrent à Lyon les ordonnances. Quelques heures après, tous les travaux étaient suspendus comme par enchantement ; les citoyens encombraient les places et les rues : des groupes désarmés, mais menaçants, faisaient en quelque sorte le siège des autorités civiles et militaires, sans qu’un régiment de cavalerie, chargé de les refouler, pût parvenir à les dissiper d’une manière définitive. Une assemblée nombreuse se réunit aux Broteaux, sous l’influence de quelques anciens membres de vente. Mais là, comme à Paris, les premiers chefs se montrèrent au-dessous de leur rôle et des circonstances. Se couvrant, dans leur révolte, de la protection des formes légales, ils invoquaient la charte, protestaient de leur respect pour