Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/502

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porter ni linge ni vêtements. L’aspect des populations traversées par le cortège avait quelque chose de grave et de recueilli. Quelques officiers parurent sur la route, s’inclinant devant ces grandeurs humiliées. Près de Carentan, deux se présentèrent. « Messieurs, leur dit le roi, gardez ces bons sentiments pour cet enfant qui seul peut vous sauver tous. » Et il montrait à la portière d’une voiture qui suivait, une petite tête blonde. Mais le temps approchait où Dieu ne laisserait plus peser le destin des empires sur des têtes fragiles.

Le 14 août, à deux heures, Charles X entrait à Valognes. Il écrivit de là au roi d’Angleterre pour lui demander un asile. On lui devait bien l’hospitalité que Louis XIV avait accordée à Jacques II.

À Valognes, les officiers des gardes-du-corps allèrent, avec les douze plus anciens gardes de chaque compagnie, remettre au roi leurs étendards. Ce fut une cérémonie pleine de larmes et d’enseignements. Le roi toucha la soie des drapeaux et dit : « j’espère que mon fils vous les rendra. » Avant de quitter Valognes, il parut avec sa famille sur le perron de l’hôtel ou il était descendu. Il portait un simple frac bleu, avec des boutons de métal, sans plaque ni rubans. Il voulut parler à la foule qui remplissait la cour : les paroles expirèrent sur ses lèvres. On se sépara en silence.

Du haut de la côte qui conduit à Cherbourg, les exilés aperçurent la mer. La colonne fit une halte. Tout-à-coup un mouvement singulier éclate dans les rangs. Des cavaliers qui avaient devancé l’escorte, reviennent au galop, apportant des nouvelles