Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/172

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avait oublié cette longue et glorieuse fraternité d’armes qui rendait une guerre à jamais impossible entre les compatriotes de Poniatowski et ceux de Napoléon. L’ordre donné aux Polonais de se tenir prêts à marcher contre la France, comblait, à l’égard de la Russie, la mesure de leurs ressentiments. L’avant-garde, comme le dit plus tard M. de Lafayette, résolut de se retourner contre le corps de bataille. Les conjurés, sentant la nécessité de se hâter, décidèrent qu’on agirait dans la nuit du 29 novembre. Des émissaires furent envoyés dans chaque palatinat. On prépara prudemment les ouvriers de Varsovie à se soulever au premier signal. Enfin, l’appui des généraux patriotes pouvant être décisif, on sonda leurs dispositions. Mais ils ne répondirent qu’avec une extrême réserve leur fortune était déjà faite. Les destins de la Pologne restèrent donc abandonnés au courage de quelques écoliers ayant à leur tête quelques sous-lieutenants.

Cependant, l’empereur Nicolas faisait contre l’Occident des préparatifs formidables ; il entassait dans la place de Modlin des munitions de guerre qui semblaient annoncer une longue lutte ; et ses soldats, appelés sur le Bug, n’attendaient plus qu’un ordre parti de St.-Pétersbourg pour fondre sur la France en poussant la Pologne devant eux. Les indiscrétions calculées du ministre des finances Lubecki, et les forfanteries du général Krasinski, ne prouvaient que trop la réalité des projets de la cour de St.-Pétersbourg.

Dès ce moment, Varsovie prit un aspect singulièrement sinistre. La police redoubla d’efforts. Le