Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/230

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savoir gré à la cour des pairs de tant d’indulgence, il se considérait comme une victime innocente de la fureur des haines de parti.

L’arrêt ne fut pas plutôt connu à Paris, que tout s’y agita d’une manière terrible. La cour était au comble de la joie. Elle ne connaissait pas tous ses dangers. L’indignation était passée du peuple à la garde nationale, qui se voyait jouée. Nous nous sommes armés, disait-on dans les rangs, pour maintenir l’ordre, pour faire respecter la loi ; mais non pour protéger des coupables et faciliter à la pairie le moyen de condamner la révolution de juillet en épargnant à ceux qui l’ont provoquée un châtiment trop mérité. Et en disant ces mots, les uns jetaient au loin leurs fusils, les autres brisaient leurs sabres jusque sur les bornes du palais. Les gardes rentrèrent dans leurs foyers, sous l’impression des plus sinistres pressentiments. La ville était illuminée, et les familles passèrent la nuit dans d’horribles angoisses, car on prévoyait la guerre civile pour le lendemain.

L’intérieur du Louvre avait, surtout, un aspect menaçant. Pour contenir les artilleurs de la 2e batterie, que les gens du roi soupçonnaient de vouloir livrer les pièces au peuple, on avait fait entrer dans la cour, par la rue du Coq-St.-Honoré, des troupes qui furent placées dans la partie latérale gauche, et qui étaient munies de cartouches. Ces précautions ayant paru insuffisantes, on fit aussi venir dans la cour du Louvre des compagnies de la garde nationale ; et M. de Rumigny, aide-de-camp du roi, envoya des caisses de cartouches au commandant du Louvre,