Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/279

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la juridiction et l’enseignement ecclésiastiques ; que le clergé relevât plus directement du Saint-Siège ; que les prêtres fussent payés par les fidèles ; mais en même temps ils déclaraient exécrable cette maxime des Gallicans qu’un prince une fois établi peut tout se permettre impunément, comme si la tyrannie ne devait avoir d’autre remède que la volonté du tyran même ; ils applaudissaient d’avance à toutes les révolutions nées d’une juste résistance à la force brutale ; en un mot, ils s’avouaient partisans de la souveraineté du peuple, s’appuyant en cela de l’autorité de Saint-Thomas, et sans s’inquiéter si la souveraineté du peuple en politique ne conduisait point à la souveraineté des fidèles en religion. On voit tout ce qu’il y avait d’heureuse témérité en ces prédications. C’était l’ultramontanisme appelé au secours de la liberté ; c’était le despotisme des rois immolé, par l’ordre de Dieu, à ces deux grandes puissances, le pape et le peuple. L’Avenir fut saisi, défendu avec éloquence par M. Janvier, approuvé dans ses doctrines par le ministère public, et acquitté. Triomphe qui ne faisait qu’ouvrir à M. de Lamennais la carrière des persécutions !

Mais que pouvait la persécution sur un homme de cette trempe ? Pour savoir ce qu’il était capable de souffrir par l’âme et par la pensée, il suffisait de voir combien son corps était débile, combien sa voix était faible, combien était malade et sillonné son visage, où une fermeté indomptable se révélait, pourtant, dans l’énergique dessin de la bouche et la flamme du regard. Doué d’une sensibilité composée en quelque sorte de violence et