Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/306

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Quant au roi, il ne manquait jamais, le lendemain des émotions populaires, de se montrer sur les places publiques, accompagné de ses enfants : il accoutumait ainsi les esprits à confondre le rétablissement de l’ordre avec la conservation de sa personne et de sa race.

Au reste, la cour avait, pour détourner d’elle les colères de l’opposition, non seulement l’obscurité qui couvrait encore une partie de sa politique, mais l’impopularité croissante de la chambre, et, surtout, l’impopularité des hommes qui la dirigeaient.

De ces hommes, le plus influent était M. Dupin aîné. Composée de bourgeois peu délicats par l’esprit et par les mœurs, la majorité de la chambre aimait dans M. Dupin aîné un geste impatient, des mouvements brusques, une rusticité pleine de fiel ; une figure expressive et dure, une éloquence dont rien ne modérait l’apreté, une certaine façon aussi étroite que pittoresque de présenter les questions, un heureux bon sens, l’art enfin de relever par une saillie décisive ou un tour vif des idées triviales et des sentiments vulgaires. M. Dupin avait les qualités et les défauts qui réussissent dans une assemblée d’hommes de robe et de marchands. Car son goût pour l’argent se traduisait en principes d’économie ; il parlait avec turbulence de protéger l’ordre, et professait avec colère une fausse théorie de modération. Dévoué au roi sans scrupule, il apportait dans son rôle de courtisan une rudesse qui en masquait l’humilité. Les esprits superficiels prenaient aisément pour de l’indépendance les accès de ce