Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/432

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et en lui : n’y avait-il donc aucune grandeur dans cette haute modération ? Au farouche plaisir de bouleverser l’univers, était-il donc si coupable d’avoir préféré la gloire de le sauver du double fléau de la démocratie et de la conquête ? On reprochait au gouvernement d’avoir abandonné l’Italie aux Autrichiens, la Belgique aux Anglais, la Pologne aux Russes ? Reproches déclamatoires et frivoles ! Ce qu’il était raisonnablement permis de tenter en faveur de l’Italie, est-ce qu’on ne l’avait pas tenté ? Les ministres du 15 mars, en arrivant aux affaires, n’avaient-ils pas trouvé l’invasion autrichienne dans l’héritage des embarras que leur avait légué le cabinet précédent ? Ils avaient demandé, ils avaient obtenu l’évacuation des États-Romains : pouvait-on vouloir davantage ? Si nos frontières n’avaient pas été reculées jusqu’au Rhin, si la Belgique n’avait pas été réunie à la France, si le roi, faisant violence à ses affections de famille, n’avait point accepté la couronne offerte à son fils, c’est que des considérations majeures étaient opposées à tout cela. Fallait-il, sans autre but que de s’agrandir, s’exposer à allumer en Europe un immense incendie ? Fallait-il, dans l’espoir d’une conquête douteuse, armer contre nous le peuple anglais, seul allié puissant que la révolution de juillet nous eût donné ? Fallait-il, menaçant du réveil de notre ambition tant de peuples sur qui pesait encore le souvenir de Napoléon et de ses batailles, leur laisser croire qu’elle allait recommencer cette longue humiliation de l’Europe, qui dura quinze ans ? La France se trouverai-elle amoindrie lorsqu’elle se montrerait à la fois désintéressée