Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/78

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pris possession par ses affidés du théâtre de l’événement que l’aumônier du duc de Bourbon, quoique sur les lieux, n’avait pas été invité à coopérer à la rédaction des procès-verbaux ; que le médecin du prince, M. Guérin, n’avait pas été appelé à l’autopsie, confiée à trois médecins dont deux, MM. Marc et Pasquier, entretenaient avec la cour les plus étroites relations. On demandait avec un étonnement railleur dans quel but M. de Broglie avait empêché qu’on n’insérât au Moniteur le discours prononcé par l’abbé Pélier à Chantilly. On établissait un rapprochement injurieux entre la catastrophe qui faisait disparaître les Condés de l’histoire, et la prospérité croissante de la maison d’Orléans. Enfin, on ajoutait à tout cela mille exagérations puériles ou folles, car la haine compromet toujours ses succès par sa violence. D’un autre côté, l’ardeur avec laquelle certains courtisans cherchaient à accréditer l’opinion du suicide, tournait au détriment de leur idole, tant il y a, aussi, d’aveuglement dans la bassesse !

Pour étouffer des bruits dont l’injure osait monter jusqu’au gouvernement, un moyen décisif s’offrait au roi. Répudier une succession à ce point ténébreuse n’eût certes pas été au-dessus de son pouvoir ; et par là il eût honoré son avènement et humilié ses ennemis. Mais Louis-Philippe envisageait autrement les Intérêts de sa naissante royauté. On l’avait vu, à la veille d’occuper le trône, faire passer hâtivement sur la tête de ses enfants, ses biens qu’il ne voulait pas, selon l’antique loi de la monarchie, réunir au domaine de l’État. C’était assez dire que, sous son règne, le mépris de l’argent ne serait point la vertu