Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/94

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heures ; ses mains, ses pieds étaient en sang ; et les blessures qu’il avait autrefois reçues dans la guerre de l’indépendance s’étaient rouvertes. De ses compagnons, plusieurs tombèrent aux mains des carabiniers royaux et furent massacrés. On en fusilla quelques-uns sur la place d’Irun, aux cris de Vive le roi absolu !

L’âme cruelle de Ferdinand VII s’était rassasiée de vengeances : il cessa de menacer le cabinet du Palais-Royal. Mais, dès ce moment, la France fut maudite par tous les patriotes espagnols, et il fut manifeste que, si jamais l’Espagne devenait démocratique, elle deviendrait anglaise. Or, le triomphe de la démocratie en Espagne étant inévitable, le gouvernement français venait de relever cette barrière des Pyrénées qu’avait abaissée le génie de Louis XIV.

Pendant qu’au midi la France perdait l’Espagne, la fortune semblait lui ouvrir, au nord, la voie des conquêtes pacifiques.

Il existait en France, à cette époque, deux gouvernements, celui de Louis-Philippe et celui des clubs : le premier, calculateur et réservé ; le second, actif, passionné, bruyant, et ami de l’imprévu. Le parti qui, à Paris, parlait de propagande, voulait qu’on poussât la France jusqu’au Rhin et qu’on étendît la main sur la Belgique, était en général composé d’hommes jeunes, étrangers aux affaires, peu riches, et par conséquent sans consistance dans une société tournée au mercantilisme. Néanmoins, ce parti était mieux conseillé par son ardeur que le parti contraire ne l’était par ses craintes. Grâce aux embarras de l’Europe, la prudence consistait ici à