Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/344

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du National, Armand Carrel ; plusieurs journaux furent saisis ; le domicile des citoyens les plus honorables fut brutalement violé ; les arrestations devinrent si nombreuses que, pour transporter les prisonniers, on dut mettre les voitures publiques en réquisition. Et de quelles couleurs peindre l’aspect hideux que présentèrent, durant ces heures consacrées à la vengeance, les cours de la préfecture de police ? A peine un prisonnier paraissait-il, qu’on voyait ces être impurs que la civilisation charge du soin de protéger la morale, se précipiter vers le malheureux avec des hurlements sauvages et l’accabler de coups impunis. L’exemple, au reste, venait des chefs. Une ordonnance de M. Gisquet, préfet de police, enjoignit aux médecins et chirurgiens de dénoncer les blessés qui réclameraient leurs secours. Mais cette indigne prescription fut annulée par le mépris public.

Le roi s’était fait honneur, devant MM. Arago, Odilon-Barrot et Laffitte, de ses projets de modération ; il avait promis que le cours de la justice régulière ne serait pas interrompu. Et cependant, à côté de trois ordonnances qui prononçaient la dissolution de l’École polytechnique, de l’École vétérinaire d’Alfort, et de l’artillerie de la garde nationale parisienne, le Moniteur publia une ordonnance qui mettait la capitale en état de siège, coup d’état inopportun du à l’initiative étourdie de M. Thiers !

L’opinion gronda aussitôt. La cour royale de Paris eut beau, sur les réquisitions du procureur-général Persil, se déclarer incompétente, pour tout ce qui touchait aux troubles des 5 et 6 juin ; les